Macrin, pour le spectateur qu'est le numismate ou l'historien moderne, est
un empereur assez mal-aimé, ressenti comme mineur.
Transition entre la fondation d'une dynastie d'empereurs orientaux et sa fin
dans le binôme de contradiction radicale Elagabal/Sévère
Alexandre, il subit le destin de toutes ces frontières qui n'existent
que par ce qu'elles séparent.
Macrin va régner très peu, signer une paix peu flatteuse avec
les Parthes, il est le premier empereur à n'avoir jamais été
à Rome durant son principat : pas de grands exploits. Il n'est
pas romain puisqu'il naît en Maurétanie Césarienne (Algérie)
à Cherchell. Probablement d'origine berbère et non punique comme
Septime Sévère, rien ne les rapproche vraiment et il ne participera
pas à l'épopée des Sévères sinon comme
fonctionnaire de haut rang.
Son origine professionnelle est, pour les romains, presque infamante :
il a été avocat du fiscus, les services de l'état chargés
de collecter les impôts. Sa première apparition dans la vie politique
se fera parmi la clientèle de Plautianus, à l'époque
richissime favori de Septime Sévère qui mariera Caracalla à
sa fille Plautille. Lors de la disgrâce de Plautianus, bon nombre de
membres de sa domus seront exilés ou assassinés mais
Macrin ne sera pas inquiété et ira servir Septime Sévère.
L'échine est souple et la personnalité celle d'un second.
Son comportement durant son règne étonne les auteurs anciens
qui rapportent ses tentatives d'émuler Marc Aurèle dans son
comportement : cette barbe que l'on voit grandir de portraits en portraits
est à l'image de celle de son illustre prédécesseur.
L'Histoire Auguste rapporte également ses attitudes, la propension
à parler très doucement et à marcher en méditant
dans son palais, comme, croyait-il, faisait Marc Aurèle.
Il tente aussi de s'insérer, à la rage de Julia Domna et de
Maesa, dans la dynastie sévérienne : il ajoute immédiatement
à son nom celui de Sévère et donne à son fils
celui de son prédécesseur immédiat, Antonin Caracalla.
Son rôle politique sera surtout de calmer les tempêtes déclenchées
par les rêves de grandeur de Caracalla et d'arrêter la lutte avec
les Parthes. Ceux-ci sont, à la mort de Caracalla, ivres de rage contre
ces romains qui ont pillé et brûlé leur capitale et dispersé
aux vents les cendres de leurs rois. L'ire des parthes sera calmée
par cinquante millions de deniers (!) mais cette paix ne fondera rien car,
malchance pour la destinée posthume de Macrin, la dynastie avec laquelle
il traite, les vieux arsacides, sera bientôt renversée par les
Sassanides, jeunes et vigoureux conquérants décidés à
reconstituer l'empire de Darius. Macrin va aussi calmer la situation laissée
par Caracalla sur un autre front, auquel il doit être particulièrement
sensible, et va rétablir à 5 % la taxe sur les héritages
que Caracalla avait portée à 10 %, son produit allant au
Trésor Militaire.
La situation de Macrin ne sera jamais simple : il ne peut aller à
Rome sans avoir réglé le problème parthe, sous peine
de déclencher immédiatement les hostilités par sa seule
absence, ni régler son autre gros problème : les membres
de la famille de Domna et particulièrement Maesa qui veulent sa perte.
Il serait en effet difficile politiquement pour Macrin de prétendre
se réclamer tant de Septime que de Caracalla et de massacrer les membres
de sa famille pour la seule raison qu'ils sont du sang de ces deux empereurs.
Maesa, qui semble avoir compris la situation, ne lui donnera aucun prétexte
pour agir contre elle tant qu'elle ne sera pas financièrement prête,
la propagande pour son candidat empereur effective et la question parthe réglée.
Domna sera moins politique et tentera immédiatement, après une
tentative de suicide à la mort de son fils, de soulever les prétoriens
à son profit, leur rappelant, dit l'Histoire Auguste, l'histoire des
grandes reines de l'Orient, de Sémiramis à Cléopâtre.
Elle n'y gagnera qu'un exil à Emèse et le retrait de ses prétoriens ;
elle mourra rapidement de chagrin et de maladie.
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